Il y a bien sûr la très célèbre petite Lucy (ou AL 288-1, découverte en 1974) avec ses 1,05 m, ses 52 os (connus) et son bassin déjà tourné vers l'avant selon Christine Berge, ce qui fait que Lucy et son Lucien devaient sans doute se faire face lors de leurs amours. Un couple moderne pour l'époque.

Mais il y a aussi la (relativement) grande Mrs. Ples, un crâne dont le nom de code est Sts-5 et la capacité de 500 cm3. C'est un adulte femelle Australopithecus africanus d'il y a 2 millions d'années découverte à Sterkfontein au Transvaal par le Dr Broom en 1936, le premier australopithèque adulte connu (Mrs. Ples, pas le Dr Broom). Elle devait mesurer 1,30m.

On connaît aussi Miss Twiggy (OH24) et Cindy (Cinderella, OH 13), deux Homo habilis retrouvées à Olduvai et datant respectivement de 1, 85 et 1, 6 million d'années, dotées de 600 cm3 de capacité crânienne. Ce sont les plus anciennes vraies femmes de la préhistoire puisque avec Homo habilis on pénètre dans le genre humain.

Quittons l'Afrique : la plus ancienne européenne est une jeune fille de 15 ou 16 ans, D2282, exhumée à Dmanissi (Géorgie) en 1999. C'est une Homo georgicus très proche des Homo habilis par sa capacité crânienne (moins de 600cm3). Son âge, 1 700 000 ans, lui a permis de détrôner une dénommée Madame Arago, la plus vieille dame de France, connue par une mandibule A2 (Arago II) et un os iliaque A44 (Arago XLIV) découverts en 1969 et 1974 à Tautavel (France) par l'équipe de Marie-Antoinette et Henry de Lumley. Mme Arago est une femme Homo erectus de civilisation tayacienne (450 000 ans). En 2001 fut mise au jour la mandibule complète d' Arago 89, une jeune fille âgée de 17 ans (Arago 2 avait quant à elle 40 ans).

Ces Homo erectus de Tautavel sont des Prénéandertaliens appelés parfois Homo heidelbergensis, tout comme une jeune femme de Steinheim, connue depuis 1933 pour son crâne (presque) complet au bourrelet sus-orbitaire relativement réduit. Elle se rapproche considérablement des espèces modernes.

Nous connaissons d'autres femmes préhistoriques encore plus modernes : les Homo sapiens archaïques. On en trouve en Afrique (l'Homme de N'dutu, en Tanzanie, et l'Homme de Salé, au Maroc, qui datent de 350 et 380 milliers d'années, sont sans doute des femmes) et plus tard au Proche-Orient : citons la femme de Galilée, découverte en 1925 dans une grotte (en Galilée !) à Mugharet el-Zuttiyeh. Pas mal moderne, la preuve : des orbites plus rectangulaires qu'arrondies, un os frontal relativement élevé. Elle a vécu il y a 140 000 ans et était de civilisation jabroudienne (acheuléen proche-oriental) avec 1100 cm3 dans le crâne. Elle est une ancêtre probable des Hommes modernes, dont l'une des plus anciennes représentantes connues est Qafzeh 9, une femme de 100 000 ans découverte en 1969 au Proche-Orient.

La dernière à se faire connaître nous vient d'Indonésie : découverte en 2003, la femme de Flores étonne le monde par sa taille (un mètre) et son volume cérébral (380 cm3) réduit pour une Homo.

"A l'intérieur [d'un même groupe] de l'espèce Homo sapiens,(...) l'analyse du squelette permet de déterminer le sexe dans 80 % des cas" explique André Langaney dans Sciences et Avenir (juillet 2005, p. 12). Mais ce pourcentage diminue nettement lorsqu'il s'agit de fossiles du Paléolithique (ibid.). Le sexe de deux Homo sapiens du site de Cro-Magnon est connu avec certitude - il s'agit d'un homme et d'une femme - mais pour les autres espèces du genre Homo, c'est 50 % d'erreur en raison du manque d'ossements nécessaires pour étudier les différences entre les deux sexes (ibid.). "D'autant plus que la forme et la robustesse des crânes dépendent en grande partie des habitudes [de vie]" (A. Langaney)