L'homme-lion du Hohlenstein-Stadel

Être composite, homme à tête de félin (peut-être une lionne). Statuette en ivoire de mammouth, de 28,1 cm de hauteur et environ 6 cm de diamètre. Découverte dans l'abri du Hohlenstein-Stadel, dans le Jura souabe (Bade-Wurtemberg, Allemagne). Datée de l'Aurignacien, il y a environ 30 000 ans. Musée d'Ulm.

Pour Marcel Otte, cette première image humaine, masculine, est extraordinairement ambiguë puisqu'elle mêle l'homme et l'animal comme si le "héros aurignacien " se déguisait en félin pour acquérir sa force, tel un prototype lointain d'Héraclès arborant sa défroque de lion. Les premières figurations aurignaciennes restituent un monde mythique déjà complexe.

Dans le Sud de l'Allemagne, les Aurignaciens ont créé entre 35000 et 30000 ans un art mobilier sophistiqué avec des statuettes en ivoire naturalistes et stylisées. Cela montre que la théorie d'un développement linéaire de l'art, qui supposait des débuts frustes et maladroits durant l'Aurignacien, suivis de progrès au fil des millénaires, n'est pas fondée. L'art étonnamment original et évolué de la grotte Chauvet-Pont-d'Arc, contemporain de ces statuettes, prouve que l'invention artistique des Aurignaciens pouvait s'appliquer avec autant de bon-

L'humain à tête de félin du Hohlenstein-Stadel
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heur aux parois des grottes, à la peinture et à la gravure, qu'à l'art mobilier et aux petites statuettes en ronde-bosse. Jean Clottes a constaté que les statuettes du Jura Souabe représentent des sujets identiques à ceux de la grotte Chauvet-Pont-d'Arc : mammouths, félins, bisons, ours, cheval, rhinocéros. Ces convergences traduisent-elles des relations directes entre Allemagne méridionale et Ardèche, par la vallée du Rhin et celle du Rhône ? Les thèmes mythiques, à cette époque, étaient-ils sensiblement différents de ceux que l'on connaîtra par la suite, lorsque la dominance du cheval et du bison succédera à celle des rhinocéros et des félins, ou s'agit-il d'un phénomène limité chronologiquement et géographiquement ? Pour Randall White, cette prédilection des Aurignaciens pour les carnivores est en tout cas retrouvée à Brassempouy où des objets de parure sont constitués par des dents percées de renards, de loups, d'ours et de lions.

texte d'après www.culture.fr/culture/arcnat/chauvet/fr/espa3_2.htm photo ©Ulmer Museum

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historique :

1939 : découverte de centaines de fragments d'ivoire par Otto Völzing & Robert Wetzel dans l'abri du Hohlenstein-Stadel
1969 : Joachim Hahn re-découvre les fragments, jusqu'alors jamais étudiés, et entreprend la reconstitution de l' "homme-lion", qui sera achevée par
Elisabeth Schmid (pour qui il s'agit d'une femme-lion) et Ute Wolf en 1988.

2002 : Nicholas Conard découvre une autre sculpture d'homme-lion, cette fois dans la grotte de Hohle Fels, près d'Ulm (Jura souabe), dans un niveau archéologique un peu plus ancien que celui de l'homme-lion du Hohlenstein-Stadel. Ce dernier n'est donc plus le plus vieil exemple d'art figuratif. La sculpture de Hohle Fels a été datée de 30 000 BP au radiocarbone.